Il est dorénavant bien admis que « les livres c’est bon pour les bébés », pour reprendre le titre d’un DVD de l’association A.C.C.E.S. qui promeut le livre dès le plus jeune âge.
Des livres pour les bébés, oui mais : pourquoi ?
Je vous propose ici un petit tour d’horizon sur l’intérêt du livre pour le tout-petit.
Un support d’éveil sensoriel
Les livres dit "dès la naissance" (en fait, plutôt dès deux mois car, les deux premiers mois, je dirais que le premier livre de l’enfant est le visage de ses parents), sont des livres dont l’objectif principal est l’éveil des sens. Selon le livre, un sens pourra être plus stimulé qu’un autre. En général le sens du toucher et celui de la vue sont les plus ciblés.
La vue du nourrisson se développe très rapidement la première année. A la naissance le bébé ne voit pas que le noir et blanc comme on l’a longtemps cru : il distingue très bien les forts contrastes donc le noir et blanc, mais il peut aussi différencier le rouge, le jaune et le vert à condition que ces couleurs n’aient pas la même brillance et aient un fort contraste.
Il existe des livres triptyques à partir de la naissance qui sont intéressants pour démarrer avec le livre pour bébé, comme l’ « Imagier à toucher » de Pascale Estellon, aux Éditions des Grandes Personnes. Il peut être ouvert en triptyque et posé à 30 cm du bébé le premier mois puis utilisé comme un livre par la suite. De plus ce livre présente des reliefs : il stimulera la vision en relief qui se développe vers 4/6 mois et il stimule le toucher dès 2/3 mois. .

A 2 mois le bébé perçoit plusieurs couleurs de bases : rouge, jaune, vert, bleu puis vers 4 mois, il peut distinguer autant de couleur qu’un adulte. Une bibliothèque de livres en noir et blanc (ainsi qu’une décoration de chambre de bébé en noir et blanc uniquement) n’a donc pas grand intérêt car elle manque de stimulation et c’est grâce à une stimulation, justement adaptée, ni trop peu, ni excessive, que la vision du bébé va se développer de façon harmonieuse et le livre peut y aider.
Il existe aussi des livres stimulant l’odorat avec des pages à frotter pour produire une odeur en lien avec un dessin. Il y a aussi des livres qui émettent des bruits particuliers ou encore des musiques ou des sons de la nature. Un livre émet aussi un son différent d’un autre lorsque l’enfant le tape au sol ou contre un jouet, et cela est aussi de la stimulation auditive pour le tout-petit.
Pour ce qui est de la stimulation gustative : elle existe aussi lorsque l’enfant porte à la bouche son livre en tissu, celui en carton ou en bois. Les sensations gustatives seront différentes ; rappelons que le bébé passe par un stade normal dit « stade oral » pendant lequel il porte tout à la bouche, cela lui permet de recueillir des informations sur l’objet, c’est donc important qu’il puisse le faire.
Grâce au livre, le bébé appréhende aussi la diversité : diversité des tailles, des formats et des poids du livre, grande variété des illustrations et des contenus… chaque livre est un nouvel objet unique qui apporte des stimulations différentes favorable au développement cognitif du bébé.
Un objet de transmissions et d’éveil culturel
Le livre permet à l’enfant de découvrir la société dans laquelle il vit ainsi que les autres cultures : il est une fenêtre vers le monde. C’est en ce sens que l’on dit de lui qu’il est un objet d’éveil culturel. A travers les comportements, les relations et les histoires que vivent les personnages, c’est tout un monde matériel et un monde de codes sociaux, et de normes qui s’offrent au lecteur.
Un support de sensibilisation à la diversité
Le livre est aussi un support de découverte de l’autre et de la diversité, et certains contenu pédagogiques favorisent l’ouverture d’esprit dès le plus jeune âge et l’apprentissage des valeurs humaines.
Je citerais pour exemple de contenu autour du vivre ensemble « quatre petits coins de rien du tout » de Jérome Ruillier aux éditions Bilboquet (ou Mijade pour la version à couverture souple), qui conte l’histoire d’un petit carré qui voudrait bien s’intégrer à un groupe de petits ronds, mais le trou qui permet d’entrer dans leur espace n’est pas de la bonne forme… après de nombreuses discussions sur le problème, ces petits ronds vont décider d’adapter le trou plutôt que de demander à petit carré de devenir rond : une belle représentation de ce que peut être l’approche inclusive en adaptant l’environnement aux diversités des individus.

Une fonction de socialisation et de relation individualisée
Le livre permet un temps de rencontre parent-enfant, d’échanges et de découvertes partagées. Il produit une pause dans notre société où tout va si vite : on s’arrête, on s’assied pour partager autour de ce livre. L’enfant a son parent pour lui, individuellement, le temps de cette lecture.
Les enfants d’une même fratrie peuvent aussi échanger entre eux : par exemple, un ainé de trois ans peut présenter son histoire favorite à son petit frère de six mois et voir ses parents étonnés de l’entendre comme s’il lisait vraiment l’histoire ! Le livre crée une dynamique de plaisirs partagés au sein de la famille.
De nombreux parents utilisent le livre en rituel du soir : une petite lecture avant de se séparer le temps de la nuit. C’est que le livre a apporté un temps relationnel avec le parent qui va être bénéfique au bébé ou à l’enfant plus grand qui va se sentir renforcé dans sa sécurité psychoaffective, ce qui sera favorable à son relâchement et à la détente nécessaire à la phase d’endormissement.
Le contenu pédagogique de certains livres destinés aux enfants en bas âge va aussi favoriser la socialisation de l’enfant en mettant en avant des compétences psychosociales mobilisées par les personnages : les émotions et leur expression, l’empathie, le partage, l’entraide…
Une fonction rassurante
L’enfant a besoin de comprendre le monde dans lequel il vit et sa curiosité ainsi que sa vitalité découvreuse en témoignent. Il a aussi besoin de repères dans le temps et dans l’espace ainsi que dans ce qu’il vit. Le livre rassure l’enfant par deux aspect.
D’une part, le livre a des repères : le texte est toujours le même, il ne change pas et l’enfant est alors en capacité d’anticiper ce monde, et aussi de faire confiance à ce qu’il connaît (d’où l’importance de lire le texte et pas d’en inventer un une fois sur deux…).
D’autre part, la fonction rassurante du livre tient au fait que certaines histoires que vivent les personnages vont permettre à l’enfant de comprendre et de résoudre des problèmes. Par exemple, il existe des livres qui parlent de la grossesse et de l’arrivée d’un bébé, d’autres qui parlent du doudou ou de la tétine ou encore du pot, d’autres encore de la séparation ou de l’entrée à la crèche…
Pour ce qui est des livres qui font peur pour les enfants de moins de trois ans, avec des monstres par exemple: là, deux approches se contredisent. L’une, avance qu’ils sont bons pour les enfants car cela permet d’évoquer des peurs et d’en parler et puis, quand le livre est fermé les monstres y sont enfermés. L’autre approche avance que les tout-petits n’ont pas un cortex orbito-frontal arrivé à maturité suffisante pour bien leur permette de gérer cette peur et que ce type de livre pourrait engendrer plus d’anxiété qu’autre chose.
Il est important d’observer son tout-petit et de savoir si ce type de lecture pourrait lui convenir ou non. J’ai pu observer en crèche des enfants rirent aux éclats en chassant un gros monstre vert page par page et j’ai pu en voir d’autres pas très rassurés de tout cela… La bibliothèque est un excellent endroit pour laisser son enfant choisir un livre et voir vers lequel il va.
Un accompagnement au développement du langage, de la pensée et de l’imaginaire
Au début le bébé manipule le livre comme un simple objet et cela lui apporte de nombreuses stimulation sensorielles, c’est une phase importante dans la découverte du livre et autant utiliser des livres solides. Puis, grâce à la médiation de l’adulte, le bébé comprend que le livre s’ouvre pour accéder à un contenu qui le rapproche de l’adulte : c’est ainsi que le bébé va manipuler ce livre de plus en plus différemment d’un autre objet jusqu’à arriver très tôt à le poser au sol et à tourner des pages, ou juste avant, le jeter au sol pour tenter d’en voir les pages intérieures.
Ainsi, les mots lus vont permettre au bébé d’accroitre son champs lexical : l’illustration couplée au mot vont l’y aider. La répétition de cette lecture va aussi permettre au bébé cet apprentissage langagier tout en travaillant sa capacité de mémorisation.
Grâce aux illustrations et aux récits, le nourrisson va penser l’histoire du livre ou les objets nommés, ce qui est favorable à sa capacité de se représenter ce qui est absent et il peut imaginer toute un monde. Ainsi, le livre accompagne le développement de la pensée du bébé.
Et pour aller plus loin...
Vous trouverez une grande variété de livres pour enfants sur le marché. Vous pouvez enrichir votre répertoire littéraire jeunesse en consultant les bibliographies de l’association A.C.C.E.S. et celles de L.I.R.E. à Paris, dont l’une d’entre elle est spécifique aux livres à proposer aux bébés avant la marche.
Sachez aussi que de très nombreuses bibliothèques disposent d’un rayon jeunesse avec souvent un espace spécial bébé. Certaines proposent aussi des animations ou ateliers livre régulièrement pour les tout-petits : je vous invite à vous renseigner auprès des bibliothèques de votre secteur.
Dans mon livre « Prendre soin de son bébé : transmissions, astuces et confidences d’une puéricultrice », je vous propose quelques pistes pour bien choisir les livres les plus adaptés au développement et aux besoins de l’enfant selon son âge et la façon de les présenter à l’enfant en bas âge. Je vous invite à le lire pour en savoir plus.
Étant une grande admiratrice de livres animés pour enfants publiés par la maison d’édition « Les Grandes Personnes », j’ai choisi de vous en présenter quelques uns ici : je les trouve d’une grande beauté artistique, variés dans le type d’illustration, la forme et la taille du livre ainsi que par la qualité du papier et le graphisme épuré. En voici une petite sélection, que vous pouvez trouver sur leur site http://www.editionsdesgrandespersonnes.com/
Sous les étoiles de Martine Perrin : « Un imagier poétique qui tisse des liens entre les éléments et les êtres vivants et parle de la vie sur terre. »

Une série de livres jeu à fenêtre ouvrant sur de belles photos de François Delebecques comme le livre « LES ANIMAUX DE LA FERME », Éditions des Grandes Personnes

Mariama