La diversification alimentaire est une étape importante pour votre enfant et pour vous même. Elle consiste certes en l'introduction douce et progressive de l'alimentation solide en plus du lait, pour répondre aux besoins nutritionnels de votre enfant, mais elle est bien plus que cela!
Lors de cette étape, c'est tout un monde de nouveautés qui s'offre à votre bébé, accompagnant ainsi son développement cognitif: stimulations sensorielles nouvelles, explosion des saveurs, plus ou moins agréables, découvertes d’ustensiles, moment de socialisation...
Estelle Ledon est puéricultrice consultante, fondatrice de " Téter, goûter, s'éveiller". Elle vous présente ici les repères qui vous aideront à y voir plus clair. Elle vous parle aussi bien de la diversification alimentaire classique que de la diversification menée par l'enfant.
Merci à Estelle pour cet éclairage, bonne lecture chers parents et bon appétit chers petits!
Mariama
La diversification alimentaire est une étape importante dans le développement de votre nourrisson. Il découvre d’autres textures, températures, odeurs et saveurs ; il passe d’un temps alimentaire se déroulant la plupart du temps dans vos bras à un repas assis face à vous ; il fait éventuellement connaissance avec un ustensile, la cuillère. Que de nouveautés !
C’est donc une découverte progressive qui s’amorce pour votre bébé, une adaptation physiologique et sensorielle, mais aussi culturelle et affective. Pour vous, parents, cela peut également être un moment de questionnements ou de confusion face aux nombreuses informations, parfois contradictoires, que vous recevez de toutes parts.
Gardez en tête que vous êtes les experts de votre bébé, que vous connaissez mieux que quiconque. Je vous présente ici quelques lignes directrices pour l’alimentation de votre enfant. Ce sont des points de repères, le mot clé reste l’adaptation : faites-vous confiance et suivez ce que vous montre votre enfant.
Quand débuter ?
Jusqu’à l’âge de 6 mois, votre bébé reçoit tous les nutriments nécessaires à sa croissance à travers l’allaitement maternel ou dans sa préparation pour nourrisson. Il est toutefois envisageable, selon la situation, d’introduire les solides à partir de 4 mois révolus.
C’est donc dans cette fenêtre, entre 4 et 6 mois révolus, que vous pouvez choisir de débuter la diversification de votre bébé.
Diversification « classique » ou diversification menée par l’enfant ?
Dans le schéma « classique » de diversification, les aliments sont présentés en purée lisse, à la cuillère. Les textures évolueront au fil du temps vers des textures moulinées, écrasées, puis des petits morceaux.
Le premier jour, quelques cuillères suffisent. Vous pourrez ensuite augmenter progressivement les quantités. Si votre bébé refuse la cuillère, pas de panique. La diversification est un processus d’apprentissage et d’adaptation : continuez de lui proposer chaque jour, sans jamais forcer, avec une cuillère adaptée. Malgré les différentes températures, les différents aliments, il n’est toujours pas intéressé ? N’ayez crainte de faire une pause de quelques jours, il n’est peut-être pas encore prêt.
La Diversification Menée par l’Enfant (DME), aussi appelée diversification autonome, est une approche basée sur la confiance dans les capacités motrices et de coordination du nourrisson. Elle consiste à le laisser manger par lui-même, dès 6 mois, de gros morceaux qu’il portera seul à sa bouche.
Cela nécessite donc de vous informer sur les présentations sécuritaires des aliments, ainsi que sur l’installation optimale. Des morceaux plus longs que le poing de votre enfant, plus larges que votre index, de texture fondante (comme un avocat bien mûr ou une courgette cuite), seront disposés devant lui, par exemple sur la tablette de la chaise haute où il sera assis droit, avec un appui pour ses pieds. Ensuite, c’est à lui de jouer ! Ne mettez jamais un morceau de nourriture dans la bouche de votre enfant, c’est lui qui doit gérer.
Au démarrage, la plupart des bébés mangent de petites quantités : c’est, là aussi, un apprentissage. Lors du temps de repas, votre enfant éveillera tous ses sens en explorant les textures, saveurs, odeurs, couleurs, températures, bruits des divers aliments. Il développera également ses capacités motrices et de coordination en les portant à la bouche, suivra ses sensations de satiété, ses envies et ses besoins alimentaires. Vous parents, allouerez moins de temps de préparation, et partagerez son repas !
On appelle diversification mixte le fait d’exercer simultanément les deux méthodes : purées données à la cuillère par le parent et gros morceaux mangés en autonomie par l’enfant. Vous pouvez faire ce choix dès le début de la diversification, ou bien un peu plus tard, quelle que soit la méthode initialement adoptée.
En cas de bascule de la diversification classique à une diversification mixte ou autonome, votre enfant sera considéré comme débutant avec les morceaux, même s’il est plus âgé, afin de le laisser progresser à son rythme et en toute sécurité.
Quels aliments proposer ?
Mises à part quelques précautions (cf ci-dessous), les aliments ne nécessitent pas d’ordre ou d’âge particulier d’introduction. La présentation, surtout en cas de DME, doit être correctement choisie.
- Les fruits et légumes seront proposés dans un premier temps nature, séparément, en privilégiant les cuissons douces à la vapeur. Choisissez-les plutôt de saison, cultivés sans pesticides. Lorsque votre bébé connaîtra ces saveurs, vous pourrez les mélanger, les agrémenter pour en créer de nouvelles.
- Les divers féculents et légumineuses font partie intégrante de l’alimentation du jeune enfant, la quantité variant selon son appétit.
- Les viandes, poissons et œufs sont introduits dès 6 mois, bien cuits, à raison de 10 g par jour (soit 2 cuillères à café) la première année. Si vous vous orientez vers une alimentation végétarienne pour votre enfant, un suivi médical ou diététique est préférable. Il sera par exemple nécessaire de commencer sa supplémentation en vitamine B 12 dès l’introduction des solides, et d’augmenter la part de céréales et légumineuses. L’alimentation végétalienne n’étant pas adaptée aux besoins nutritionnels des nourrissons, je vous invite à en parler à un médecin (pédiatre ou nutritionniste) pour en comprendre les risques et les règles indispensables avant de faire votre choix.
- Pensez à ajouter une cuillère à café d’huile végétale riche en oméga 3, après cuisson (évitez les aliments frits). Les acides gras insaturés sont essentiels au développement cérébral de votre nourrisson. Vous en trouverez également dans les beurres des noix, les avocats, les poissons gras.
L’un des principaux intérêts de la diversification est la formation du goût, mais aussi la socialisation à travers le partage de repas. Pour plus de facilité, commencez par les aliments que vous aimez et avez l’habitude de manger. Vous constaterez même que votre bébé préfèrera les aliments que vous avez consommé enceinte et/ou en allaitant.
Ne vous privez pas pour autant de lui faire découvrir un maximum de saveurs ! Si votre bébé semble de pas aimer un aliment, n’hésitez pas à lui reproposer plusieurs fois, sous différentes formes ou recettes. Il faut parfois plusieurs présentations pour que l’aliment soit accepté.
La multiplication des expériences sensorielles dans les premiers mois de diversification diminue effectivement le risque de refus des nouveaux aliments (néophobie alimentaire) vers l’âge de deux ans. De plus, cela augmente le nombre d’aliments consommés à 6 ans : on appelle cela le répertoire alimentaire. Afin de l’enrichir, diversifiez aussi les plaisirs ! Vous apporterez en même temps des vitamines et minéraux différents et complémentaires.
En effet, les besoins notamment en fer et en zinc augmentent à partir de 6 mois, et les apports ne sont plus entièrement couverts par l’allaitement. Vous trouverez du fer dans la viande et le poisson, mais aussi dans les légumineuses (lentilles, haricots secs, pois chiches…), les graines (courge, sésame…) et les légumes verts (brocolis, épinards, choux, haricots…). Les aliments les plus riches en zinc sont les crustacés et le saumon, les œufs et la viande rouge, les amandes et noix de cajou, les graines et le son de blé (ou blé complet).
Quelques précautions
N’ajoutez ni sel ni sucre dans les aliments de votre jeune enfant. Les produits salés ou sucrés (charcuterie, fritures, biscuits salés, boissons sucrées, gâteaux industriels, etc.) sont à éviter.
Vous pouvez en revanche utiliser des herbes aromatiques et des épices.
Jusqu’à l’âge de 5 ans, veillez à cuire suffisamment viandes, poissons et œufs, et proposez des fromages pasteurisés ou à pâte cuite, en raison des risques bactériologiques et parasitaires. Le miel, quant à lui, pourra être introduit à partir d’un an (risque accru de botulisme infantile la première année).
Quel que soit le mode de diversification choisi, évitez également les aliments collants (mie de pain, brioche, feuilles de salade…) jusqu’à la sortie de toutes les dents de lait, et pelez les fruits dont la peau se détache (pêche, nectarine…). Les petits aliments durs et/ou ronds (comme les fruits à coques, les raisons secs, les tomates cerises, le raisin) ne seront proposés entiers qu’à partir de 4 ans.
Essayez de présenter les allergènes principaux entre 6 et 9 mois (gluten, protéines de lait de vache, œuf, arachide, sésame, soja, moutarde, céleri, lupin, poissons, crustacés et mollusques, sulfites), un à la fois sur plusieurs jours.
Organisation des repas
Les horaires et contenus des repas sont davantage régis par des habitudes sociales que par les besoins physiologiques du nourrisson, qui peut manger de tout, à toute heure. L’important est le plaisir de découvrir et de manger, la convivialité.
Préférez donc écourter ou reporter un repas lorsque votre bébé est fatigué, malade ou distrait. N’oubliez pas que c’est par l’imitation que l’enfant apprend : montrez-lui l’exemple en partageant les temps de repas.
Le lait occupe place importante dans l’alimentation de votre nourrisson. Proposez plutôt les repas de diversification entre les tétées ou les biberons, lorsque votre bébé semble disposé à explorer. Les solides ne remplacent donc pas une tétée (ou un biberon), mais la complètent. L’allaitement se poursuivra en parallèle, à la demande, aussi longtemps que vous le désirez.
En diversification classique, vous pourrez proposer à votre bébé un repas solide par jour les premiers mois, puis 2, et enfin 3 vers un an. Bien que leurs goûts et textures soient plutôt uniformes, les aliments du commerce (« petits pots ») sont une alternative sûre en termes de qualité nutritionnelle et de sécurité. Sentez-vous donc libres de cuisiner ou non pour votre enfant.
En DME, c’est la multiplication des occasions qui permettra à votre nourrisson de s’entraîner, progresser et s’alimenter. Passées les premières découvertes, n’hésitez pas à rapidement lui présenter plusieurs repas solides par jour. Pensez à lui proposer de l’eau lors de ses repas, qu’il soit allaité ou non.
En résumé, la diversification est un temps d’apprentissage et de socialisation autant que d’éveil au goût. L’essentiel est d’offrir à votre bébé des expériences alimentaires positives, dans un environnement serein. Une fois intégrées quelques règles de base, laissez libre cours à vos envies, selon votre situation et vos habitudes.
Je vous souhaite une belle diversification !
Estelle Ledon
Infirmière Puéricultrice titulaire du DIULHAM
Après une douzaine d’année d’exercice en milieu hospitalier, j’ai choisi la voie de l’accompagnement parental à domicile (ou à distance en visioconférence).
Spécialisée en allaitement maternel à travers un diplôme universitaire, j’aborde également, lors d’ateliers collectifs ou de consultations, l’alimentation du jeune enfant au sens large, mais aussi le sommeil, les rythmes et les pleurs, les soins d’hygiène, et tout ce qui a trait au maternage et à la parentalité. Mon expérience en néonatologie me permet de proposer un accompagnement à la parentalité également adapté aux nouveau-nés prématurés ou fragiles.